Vierzon : église transformée en mosquée ?



L'actualité contemporaine est souvent liée à la loi du succès : il faut « faire le buzz », comme on dit aujourd'hui. C'est à dire obtenir le maximum de connexions et d'interventions de lecteurs. Les journalistes formés aux moyens modernes de communication ont évidemment flairés le bon filon avec cette histoire d'église mise en vente et qui intéresserait (éventuellement) une communauté musulmane locale pourtant assez désargentée. Et voilà comment Vierzon se trouve précipitée au firmament du succès éphémère, ce qui ne lui était pas arrivée depuis la célèbre chanson de Jacques Brel.

« T'as voulu voir Vierzon et on a vu Vierzon » chantait le grand Jacques accompagné à l'accordéon par le célèbre « Marcel » Azzola (« chauffe Marcel, chauffe ! »). Des télévisions coréennes et américaines ont suivis le même refrain, avec le même entrain, et sont venues demander au Père Alain Krauth (chargé de gérer la vente) comment l'église catholique locale pouvait ainsi abandonner le terrain religieux conquis depuis des siècles... car il semblerait que même si plusieurs dizaines d'églises sont vendues chaque année dans notre pays, cette transformation d'une église en mosquée serait une première en France.

Je vous fais grâce, vu les termes employés, des différentes interventions qu'il était possible de trouver sur le net à la suite de cette nouvelle apparemment alarmante. « Désaffection pour la foi chrétienne », « envahissement islamique » étaient le bruit de fond dans lequel baignaient la plupart des proses des « posteurs » indignés. Mais pour ne pas en rester à une reprise généralisée des arguments raz du plancher des différents « blog identitaires » opposés à « l'invasion », il me semble qu'il serait profitable de bien savoir de quoi l'on parle lorsqu'on prétend vouloir défendre ce que certains persistent à appeler « les lieux de culte chrétiens ».

Il est important de savoir que l'idée même d'un lieu sacré où se réuniraient les chrétiens est totalement absente du Nouveau Testament et des premiers siècles de l'histoire de l’Église. Le Christ n'étant pas venu amener une nouvelle religion avec ses « lieux saints » et son clergé, mais venant littéralement apporter la « vie de l'éternité », c'est à dire la Vie qui vient d'En Haut et qui donne les moyens de pratiquer la justice et l'amour divin. Une vie de foi qui remplissait toute l'existence de ceux qui la recevaient et ne séparait plus de façon schizophrénique le profane et le sacré, mais qui les réunissait dans une unité intérieure et communautaire équilibrée.

À l'époque du Christ il y avait une concurrence religieuse (il n'y a rien de nouveau sous le soleil...) entre le Temple de Jérusalem où les juifs adoraient, et le mont Garizim où les samaritains rendaient leur culte. À une femme samaritaine qui l'interrogeait sur l'emplacement du lieu « officiel » d'adoration, Jésus va répondre :

« Femme, lui dit Jésus, crois-moi, l'heure vient où ce ne sera ni sur cette montagne, ni à Jérusalem que vous adorerez le Père. Vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs. Mais l'heure vient — et c'est maintenant — où les vrais adorateurs adoreront le Père en Esprit et en vérité ; car ce sont de tels adorateurs que le Père recherche. Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l'adorent, l'adorent en Esprit et en vérité. » (Jean 4 : 21-24.).

Déjà le prophètes de l'Ancienne Alliance avaient mis en garde contre l'illusion de se croire juste pour la simple raison que l'adoration se faisait dans les temps et les lieux prescrit, mais sans chercher à progresser dans une vie personnelle qui soit conforme à la justice et à l'amour (voir à ce sujet Ésaïe 1 : 11-17 et Amos 5 : 21-24.). Car Dieu n'habite pas dans ce qui est fait par la main de l'homme, mais Il est présent dans les cœurs de ceux qui le reçoivent dans la simplicité et l'humilité.

Si nous nous penchons sur les écrits de référence du christianisme que sont les évangiles et les épîtres, nous pouvons constater qu'il y a eu au cours des siècles un fâcheux glissement du sens des mots :

- Église : dans tout le Nouveau Testament ce mot n'est JAMAIS employé pour désigner un bâtiment religieux, mais toujours pour parler simplement du rassemblement de ceux qui sortaient d'un système spirituel qui les avait rendu esclaves. Le terme grec « ekklésia » qui a donné le mot français « église », ainsi que le terme « ecclésiastique », signifie littéralement : « rassemblement en dehors » (ek = en dehors + klésia = rassemblement). Lorsqu’ils ont conçu une version grecque de l'Ancien Testament appelée « la Septante » (environ 200 ans avant Jésus-Christ), les traducteurs hébreux ont employé ce terme pour désigner le peuple appelé par Dieu à sortir de l'esclavage de l’Égypte de Pharaon (traduit par « l'assemblée » dans nos Bibles en français). Le premiers apôtres ont donc tout naturellement repris ce même terme pour désigner les disciples qui se « rassemblaient en dehors » des structures religieuses juives. Car le système religieux de l'époque, après avoir rejeté la Vie que le Christ était venu apporter, cherchait à mettre-au-pas ceux qui avaient cru en Lui et les pourchassait. N'oublions pas en effet que le système religieux, installé à Jérusalem à l'époque, était l'instigateur de la crucifixion du Christ (avec l'aide des autorités romaines) et qu'il a continué pendant longtemps à poursuivre et à persécuter les premiers disciples du Christ.

Rappelons cette parole du Christ :

« Je bâtirai mon Église, et les portes du séjour des morts ne prévaudront pas contre elle. » (Matthieu 16 : 18.)

Nous savons bien que le Christ n'a pas pris la truelle et le mortier pour construire un lieu de culte visible. Pas plus à Constantinople qu'à Saint Pierre de Rome. Ce qu'Il a bâti (et continue à construire), c'est un édifice spirituel composé de « pierres vivantes » (1 Pierre 2 : 5.), c'est à dire d'humains qui confessent son Nom et vivent de sa Vie en s'édifiant mutuellement. Les disciples du Christ ne sont donc pas des gens qui « vont à l'église » le dimanche, mais qui « vivent l'église » dans tous les instants et dans tous les lieux qu'ils fréquentent. 

Cette « vie de l'éternité » remplit tous les jours de la semaine et tous les lieux où se trouvent les croyants. Lorsqu'on (re)commence à lui assigner des jours et des lieux précis (comme dans l'Ancienne Alliance mosaïque) on enlève à cette vie sa dynamique fondamentale et on contribue malheureusement à son extinction. Car la vie est une source qui doit couler librement pour amener la bénédiction à ceux qui en sont arrosés. Un sarment qui n'est pas continuellement attaché au cep ne pourra jamais porter de fruit. De la même manière, un chrétien qui attend le dimanche pour avoir une communion avec Dieu aura de grosses difficultés à porter le fruit d'amour et de justice qui est pourtant promis aux véritables disciples du Christ... être disciple du Christ est une activité à temps-plein !

Pour en revenir à cette église de Vierzon qui est mise en vente à cause de la désaffection des fidèles (car c'est ce manque de participation qui amène à un resserrement des budgets et oblige à sa vente), j'ai l'impression que le côté symbolique de son éventuel transfert à une religion différente nous voile un peu sur la vision spirituelle de la situation. Il est évident que si la vente avait lieu et que ce bâtiment devenait une mosquée, la croix qui surplombe l'édifice disparaîtrait probablement rapidement, puisque l'Islam nie et réfute la crucifixion et la résurrection du Sauveur du monde. La réalité de la mort et de la résurrection du Fils de Dieu est d'ailleurs ce qui sépare fondamentalement la foi et l'espérance chrétienne de la religion musulmane. 

Mais le combat de la foi consiste-t-il pour autant à se battre pour sauver un tas de pierres, de bois et de tuiles surmonté d'une croix ? Ne serait-il pas plus judicieux de s'inquiéter d'abord du manque de vie dans le cœur de tous ces « chrétiens » qui ne sont plus que quelques lignes d'encre oubliées sur des registres religieux poussiéreux ? Ces « chrétiens de nom » remplissent peut-être les statistiques des registres de baptême, mais ils ne se rassemblent plus pour prier Dieu et (surtout!) pour écouter ce que la Parole Divine voudrait faire germer dans leurs vies spirituelles presque éteintes ?

Le Christ « n'éteint pas le lumignon qui fume encore » (Es. 42 : 3 - Mat. 12 : 20.). « on n'entendra pas sa voix dans les rues » au travers de pétitions ou de souscriptions, mais « il annoncera la justice et la vérité ». C'est à cela que le Corps de Christ est appelé : à annoncer fidèlement la justice et la vérité du pardon de Dieu manifestés en Jésus-Christ. C'est de là que vient la Vie qui rassemble ceux qui reçoivent la puissance qui est contenue dans l’Évangile. 

Avant de vouloir sauver un bâtiment inoccupé, ne serait-il pas plus urgent d'amener au salut en Christ ceux qui pourront éventuellement s'y assembler, lorsqu'ils auront vraiment cru ?

Jean-Luc B

Dernière nouvelles.

L'ancienne «église» Saint Éloi «désacralisée» depuis son rachat par la municipalité en juin 2013 est inoccupée depuis lors.

Contrairement à tout ce qui avait été écrit, la communauté musulmane vierzonnaise a renoncée à l'acheter. Il est même devenu dangereux de s'y aventurer à cause d'une faiblesse de la charpente qui menace de s'effondrer...

Voici une photo prise devant son entrée en décembre 2014 et qui pourrait éventuellement se comprendre comme une parabole d'avertissement...

Ces prétendus «lieux sacrés» n'ont décidément rien d'inébranlable et menacent même d'écraser les croyants inconscients qui imagineraient y trouver un abri... mais il faut que ce soit le maire communiste de la ville qui les mette en garde !




Dans le même ordre d'idée : 








Commentaires

  1. amen tout à fait exact! c'est du n'importe quoi, les religieux vont bien ensemble, apres on s'etonne que l'eglise catholique se plaint d'une desertification de ses ouailles!

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  2. Sans aucun doute, ce "souci" ne relève que du domaine religieux du monde. Et il était nécessaire de faire cette mise au point pour révéler où se situe véritablement le "royaume de Dieu".

    Sachons néanmoins que les peuples Arabo-musulmans ont une conception musulmane à "double standard" du mot annexion. Là où un musulman pose le pied, la terre, dès lors, devient Terre d’Islam, et dès lors, selon la charia, elle doit impérativement être administrée »Ad vitam æternam » par des musulmans.

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